1 mars 2021

La loi comptable du 30 avril 1983 a instauré l’obligation de produire une annexe. C’était un document nouveau inspiré des pratiques anglo-saxonnes. Il s’agissait, à l’époque, d’un document “d’information complémentaire”. Les professionnels ne savaient pas comment le remplir car le Plan Comptable Général de 1957 qui le précédait ne prévoyait aucun document de ce type.

Cela fait maintenant 27 ans que ce document existe et, avec le retour d’expérience, que peut-on en dire ?

Un volume de plus en plus important d’informations doit être donné. Cependant, alors que certaines entreprises divulguent trop d’informations au risque de masquer celles qui peuvent être importantes, d’autres n’en communiquent pas assez et nous n’avons donc pas une vision claire de leur situation.

On arrive ainsi à une situation paradoxale et ambivalente. A la crainte de l’Annexe incomplète se joint celle d’une divulgation d’informations confidentielles.

Pourtant, l’Annexe pourrait être un outil majeur pour un expert-comptable. Il est clair que cet outil est important prioritairement pour les entreprises qui ont besoin de communiquer. Mais leur nombre est toujours croissant !

Quelles sont les principales critiques de l’Annexe ?

La présentation actuelle de l’Annexe ne correspond plus aux besoins en raison de la diversité des utilisateurs intéressés.

A la volonté de satisfaire chacun d’entre eux, la forme actuelle donne plutôt l’impression de ne satisfaire personne.

Les travaux de Jean-Louis COUDRILLIER, présentés en 1987 dans son mémoire “Révision de l’Annexe : approche méthodologique”, évoquent des problèmes de différents types :

– indication de tous les points prévus par les textes sans en rechercher le caractère significatif, – abus de tableaux et répétition de textes standardisés,

– mise en oeuvre des traitements informatisés de l’Annexe non sélectifs…

Au bout de 23 ans, n’avez-vous pas l’impression que l’Annexe est restée figée dans le temps sans avoir été améliorée ?

La question de confidentialité

Nous sommes d’accord qu’il convient de protéger l’information de l’entreprise mais certaines données essentielles sont parfois omises sous couvert de la confidentialité.

De même le développement des outils numériques permet à présent d’accéder à des informations plus pertinentes, exhaustives et accessibles. Ainsi, le greffe publie en juillet des données qui datent de plus d’un an. La notion de confidentialité doit être revue car une information “protégée” peut rapidement être obsolète. Cela ne signifie pas que nous devons forcer les entreprises à communiquer toute information mais il est évident qu’il faut revoir cette notion.

 

L’Annexe libre

J’ai mis en ligne un questionnaire à destination des utilisateurs des comptes annuels. Il y figure une question concernant l’Annexe libre. Plusieurs banquiers et avocats ont répondu : “De quoi s’agit-il ? Je n’en ai jamais vu”. Or ce document très important indique des évènements de la vie de l’entreprise qui ne sont pas visibles dans les comptes comme, par exemple, des problèmes liés à la production. Il est fort dommage qu’il ne soit que très rarement complété.

Les pistes pour le changement

Tout d’abord, la structure de l’Annexe est à revoir pour en améliorer la lecture. Celle-ci est à l’étude à l’IASB mais une réflexion est possible en France.

L’utilité de chaque information ainsi que l’ordre et la manière de les présenter peuvent être une des pistes.

De même, une étude comparative avec d’autre pays pourrait être pertinente. Par exemple, au Luxembourg, il est prévu par la législation d’indiquer la valeur du marché des titres, même si elle n’a pas été retenue dans le calcul des dépréciations. Dans le cadre de mes missions de commissariat aux comptes, il m’est souvent arrivé de ne pas pouvoir accéder à ce type d’informations.

Ensuite, la notion d’information significative est à revoir et à définir. En ce qui concerne les éléments quantitatifs, nous pourrions imaginer instaurer des vrais critères à l’instar du seuil de signification. Pour les critères qualitatifs, la définition de ce seuil doit revenir au jugement professionnel d’un expert-comptable ou DAF, en le justifiant.

Puis, il faudrait éviter les doublons avec la liasse fiscale ou avec le rapport de gestion. Une réflexion sur la redondance des informations avec ces documents est nécessaire. Pour contourner la question de confidentialité, nous pourrions imaginer la création d’une Annexe complète pour les besoins de la gestion et de la communication interne à la société (banque, CAC, financement) et d’une version simplifiée qui sera publiable et de laquelle nous retirerions les informations sensibles. Cette distinction doit être automatisée afin que l’expert-comptable puisse mener sa mission à bien avant la publication de l’Annexe simplifiée.

Enfin, la digitalisation permettrait également d’avoir des détails sur certains chiffres du bilan ou du compte de résultat grâce au principe du lien hypertexte. Ce serait tellement plus facile ! Les pistes de réflexions sont si vastes qu’il est difficile d’être exhaustif !

En conclusion, il me parait important de remettre en perspective la finalité de l’Annexe. Il s’agit d’un élément indispensable à la bonne information qui permet à l’utilisateur des données financières d’avoir une vue d’ensemble et de manière rapide. Il ne s’agit certainement pas d’une obligation supplémentaire sans grande utilité, mais d’un outil de force de l’expert-comptable.

Est-ce que ce document remplit toujours cette fonction ? A vous de juger. De toute évidence les voies d’amélioration existent ! Je reconnais cependant que cela constitue un chantier énorme. Je me suis lancée dans ce chantier dans le cadre de mon mémoire en vue de l’obtention de mon diplôme d’expert-comptable.

En espérant apporter des solutions de qualité en 2021 !

 

Yaryna Tun, Mémorialiste

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