30 mars 2020

L’administration fiscale à la recherche d’efficacité avec les nouvelles technologies

L’administration fiscale se digitalise de plus en plus. Nous le voyons depuis quelques années, notamment par les aspects télé déclaratif et plus récemment avec de nouvelles modalités de réalisation du contrôle fiscal. Depuis le 1er janvier 2014, aucun contrôle fiscal ne se réalise sans la transmission du FEC. Il représente la pierre angulaire de la digitalisation de l’administration fiscale.

Cette stratégie de digitalisation a eu pour conséquence de créer, le 29 décembre 2016, l’examen de comptabilité. Il oblige le contribuable à transmettre son FEC, dans les 15 jours de la réception de l’avis. Il s’agit d’un contrôle fiscal réalisé à distance, et le FEC représente le seul support d’investigation du vérificateur.

Néanmoins, en France, cette transmission de l’exhaustivité des données comptables du contribuable, n’est à réaliser qu’en cas de contrôle fiscal. En la matière, un certain nombre de pays européens vont plus loin, en demandant la remise régulière des données de facturation. L’Italie, depuis le 1er janvier 2019, a rendu obligatoire la transmission des factures électroniques. L’Espagne oblige la remise des données de facturation à partir du 21 de chaque mois. La Pologne et la Hongrie suivent ce modèle. A ce sujet, en France, l’article 153 de la loi de finances pour 2020, rend obligatoire la facturation électronique entre professionnel, au plus tard, à partir du 1er janvier 2025.

Concernant l’utilisation du FEC, la DGFiP gagne en efficacité et acquiert une nouvelle compétence, à savoir l’analyse de la donnée. Elle regarde autant les aspects de fonds que de forme, à partir des logiciels d’analyse de données. Elle cible directement des points de contrôle, comme les radars automatiques sur les autoroutes. Nous voyons de plus en plus de contrôles sur la qualité comptable, chose qu’elle ne regardait pas auparavant, car elle n’avait pas l’exhaustivité de la comptabilité.

 

Et l’expert-comptable dans tout cela ?

Cette digitalisation n’est pas sans conséquence pour le professionnel, car il doit s’assurer qu’il est en phase avec cette mouvance. Selon une enquête récente, 8 experts-comptables sur dix, n’incluraient pas le diagnostic du FEC dans leurs procédures . Par ailleurs, selon une étude sur la base de 60 FEC, chacun présentait des anomalies sur la qualité comptable.

Il n’y a pas d’effet sans cause, il est donc nécessaire pour l’expert-comptable de s’outiller et de mettre en place des procédures pour réduire sa responsabilité. En effet, dans le cas de la mission de présentation, si le professionnel tient la comptabilité alors il doit assurer la qualité des enregistrements qu’il réalise et générer un FEC conforme.

En conséquence, il doit lui aussi acquérir cette compétence d’analyse de la donnée, pour sécuriser et gérer les données présentées dans ses FEC.

Il est nécessaire au préalable d’identifier les dossiers soumis à l’obligation de générer un FEC et d’axer les contrôles sur ceux-ci.

Depuis le 1er juin 2018, une tolérance permet aux experts-comptables, dans certains cas, de ne pas valider les écritures fondant une déclaration de TVA. Il doit identifier les dossiers soumis ou non à cette tolérance.

Compte tenu de l’article 153 de la loi de finances pour 2020, il est probable que cette tolérance soit caduque prochainement, car l’information sera disponible en temps réel et sécurisée par des moyens technologiques. Cette validation constitue un principe comptable obligatoire, pour figer les écritures. Pour les annuler, il n’est plus possible de supprimer/modifier le brouillard mais de contrepasser l’écriture en question.

Le professionnel doit utiliser un guide de saisie pour savoir comment les données doivent être présentées les FEC.

Ensuite, il peut utiliser des outils du marché pour diagnostiquer les FEC mais aussi concevoir ses propres outils. Ces derniers lui permettront d’être autonome, de les développer à son rythme et à sa convenance en fonction des problématiques identifiées.

Ce type d’outil permettra au cabinet d’analyser facilement la donnée comptable, de gagner du temps sur des tâches à faible valeur ajoutée et de réaliser des contrôles exhaustifs sur mesure.

Par ailleurs, en 2016, seulement 14 % des TPE-PME ont eu recours à un expert-comptable pour avoir le conseil régulier d’un professionnel de la gestion.

Dans ce sens, le temps gagné par l’automatisation et le FEC peut permettre de se focaliser sur du conseil à haute valeur ajoutée, pour inverser cette statistique.

 

Le FEC pour rationaliser la procédure du contrôle de la TVA

Quoi qu’il en soit, le FEC ne doit pas seulement être appréhendé sous le seul angle du contrôle fiscal et du respect du droit comptable. En effet, son format standard doit représenter la pierre angulaire de la digitalisation d’un cabinet, pour fiabiliser ses procédures internes et lui faire gagner du temps sur des tâches sans apport réel sur les activités de ses clients.

Aujourd’hui, seulement 2 experts-comptables sur 10 utilisent le FEC pour d’autres aspects que des contrôles fiscaux.

Le FEC est la meilleure source d’informations pour collecter et analyser automatiquement la donnée. Quelle que soit l’entreprise, aussi bien le boulanger de notre quartier que l’entreprise du CAC 40, la comptabilité est toujours servie de la même façon. Le contenant reste le même, seul le contenu varie.

Le FEC possède toujours les mêmes informations aux mêmes endroits et représente une source de gain de productivité important pour mécaniser la conception de contrôles.

Une fois le contrôle imaginé, réalisé et fiabilisé, alors il est automatisable. Que ce soit avec les macros d’Excel ou un autre type de code. Le plus important n’est pas l’outil utilisé mais le résultat obtenu, son analyse et surtout l’utilisation qui en est faite.

Aujourd’hui, nous réalisons certains travaux courants qui sont chronophages et qui n’apportent pas de valeur ajoutée aux activités courantes des clients. Il peut s’agir du contrôle de la TVA, occupant une place importante dans les cabinets, surtout quand il faut trouver l’origine de l’écart entre la TVA théorique et la TVA sur les factures. Cette procédure implique une mobilisation de temps important, car l’intégration et la gestion des données ne sont pas rationalisées.

Le FEC peut permettre de rationnaliser cette procédure via des libellés de comptes standardisés. L’idée sous-jacente est de standardiser le contenu du FEC par l’intermédiaire d’une norme de saisie.

En fonction des libellés standardisés du plan comptable (Ex. : 445710 – TVA COLLECTEE 20 % / 706100 – PRESTATIONS DE SERVICES 20 %), il est possible de croiser les données pour capter les informations et les reporter automatiquement dans un tableau de contrôle. Cet automatisme identifie en quelques secondes les erreurs de saisie (Ex. : Inversion du produit avec le compte de TVA) et si les factures sont mal conçues.

Cette démarche peut être appliquée pour la TVA collectée et la TVA déductible. D’une manière générale, il est possible de se focaliser sur les taux couramment utilisés par l’expert-comptable, à savoir le 20 %, 10 %, 5,5 %, 2,1 %. Pour la TVA collectée, il est possible d’inclure les exportations, les livraisons intracommunautaires et les opérations exonérées. Enfin, il est nécessaire de réaliser une tenue détaillée des opérations et de proscrire la centralisation mensuelle des écritures comptables.

Le FEC comme levier de croissance pour nos clients

Aujourd’hui, des solutions comme IpaidThat et Receipt Bank simplifient la récupération des factures et automatisent la tenue. Ces solutions informatiques, permettent de concevoir quasi-automatiquement les écritures et représentent un temps précieux pour le professionnel. Cette automatisation va s’accélérer, compte tenu de l’obligation d’émettre des factures électroniques entre professionnel au plus tard début 2025. Ces dernières seront standardisées et faciliteront leur intégration dans la comptabilité.

Si la saisie est automatisée et que les moyens de contrôles le sont également, alors l’expert-comptable va gagner du temps sur la réalisation des tâches à faible valeur ajoutée. Il n’est pas sans rappeler que 65 % des TPE-PME souhaitent de l’aide à la gestion via des tableaux de bord.

Dans cette optique et à partir des connaissances du professionnel et du FEC, il est possible de créer des indicateurs de gestion automatisés. Il peut permettre de récupérer toutes les informations nécessaires au client, à savoir le chiffre d’affaires, les achats de marchandises, la marge, les charges de personnel, la rémunération des gérants TNS et les autres produits et charges. L’ensemble de ces indicateurs peuvent être présentés mensuellement, de manière cumulée et rapporté au chiffre d’affaires.

En outre, il est aussi possible de créer mensuellement des indicateurs de bilan, à savoir les dettes fournisseurs, le solde de la trésorerie et les créances clients.

Il est même possible de personnaliser les indicateurs et de présenter les données par activité. C’est le cas pour les sociétés possédant des activités de restauration et de débit de boissons.

Tous ces indicateurs sont rapidement identifiables selon la racine des comptes, et sur la base de colonnes complémentaires au FEC.

Aujourd’hui, le FEC représente un support d’échange avec les clients de l’expert-comptable. Il offre la possibilité de créer en quelques secondes un radar de gestion, avec les données essentielles pour assurer le suivi courant de sa gestion. Il permet de répondre à besoin patent d’aide à la gestion et de faire en sorte que l’expert-comptable s’approprie de plus en plus le statut d’expert-conseil.

De ce fait, le FEC ne doit pas seulement être utile à la DGFiP, mais surtout aux experts-comptables et à ses clients. Il peut également servir à automatiser la création d’un tableau de flux de trésorerie ou encore à réaliser une analyse sectorielle des clients. Quoi qu’il en soit, il représente depuis le 1er janvier 2014, le point de sortie standardisée de la comptabilité, à partir duquel il est possible de générer tout type d’état. Il offre à l’expert-comptable une nouvelle compétence, à savoir l’analyse de la donnée.

En outre, les cabinets auraient tort de ne pas sentir les impacts positifs du FEC, car comme le dit un proverbe chinois, “quand le vent du changement se lève, les uns construisent des murs et les autres des moulins à vent.” Dans ce sens, il faut voir le FEC comme une véritable opportunité réglementaire d’améliorer la qualité de l’information comptable, d’automatiser des procédures internes génératrices de temps sans apport sur l’activité des clients et de servir de base pour optimiser la gestion de leurs entreprises…

Julien ROYER, Expert-comptable mémorialiste

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