4 juillet 2018

En 1985, Michael Porter, professeur d’économie à Harvard, explique la stratégie de positionnement dans son livre : l’avantage concurrentiel. 30 ans avant l’ubérisation, Porter y décrit avec précisions les phénomènes de disruption d’un marché.

De quoi s’agit-il ?

Pour expliquer les grands mécanismes de la disruption, prenons un exemple simple, celui des DROGUERIES-QUINCAILLERIES.

Vos parents ont connu ces grands bazars des centres-villes. Ils se sont multipliés au lendemain de la seconde guerre mondiale et ont quasiment tous disparus avant les années 2000.

Dans les années 60, ils exercent un commerce florissant en répondant à une large demande : le bricolage, les arts de la table, la décoration, le jardinage, les loisirs, les soins corporels, le petit ameublement et l’électroménager.

Mais dans les années 70, ces enseignes se font attaquer sur l’ensemble de leurs marchés de prédilections. Pour chacun de leurs rayons, ils subissent ce que l’on appelle la BIPOLARITÉ DE L’OFFRE : il y a toujours un concurrent pour proposer un peu moins cher ou un peu mieux…

Malgré tout, les BAZARS misent sur deux attributs : LA PROXIMITÉ et les CONSEILS GRATUITS car leurs vendeurs en connaissent un rayon !

Au final, leur position médiane appelée stratégie générique devient intenable et les bazars ferment les uns après les autres… certains essaient de se repositionner mais il est déjà trop tard.

Les bazars comprennent à leur dépend le fameux adage « QUI TROP EMBRASSE MAL ÉTREINT. »

La politique du tout-venant n’a pas survécu aux offres ciblées. C’est la logique de marché.

Les BAZARS ne sont pas les seuls à avoir connu ce phénomène : citons la presse, l’hôtellerie traditionnelle, le commerce de sport, les cliniques, les cinémas indépendants, … bref, tous les secteurs concurrentiels !

Dans la plupart des secteurs concurrentiels, très peu de concurrents sont enlisés dans la voie médiane. La voie médiane n’est possible que si le secteur est très favorable, protégé ou réglementé.

La profession comptable

Les cabinets d’expertise comptable sont engagés depuis plusieurs années dans une logique de marché. Ils sont désormais confrontés aux mêmes mécanismes concurrentiels malgré les spécificités de leur profession.

Qu’observe-t-on ?

À l’exception de quelques spécialistes, la majeure partie des cabinets occupent une place médiane. Ils font de la tenue, de la révision, du social, du juridique et du conseil pour tout type de clientèle. Sous l’effet de la concurrence et de la déréglementation, ils commencent à ressentir les méfaits de la stratégie générique.

Des « petits » segments de marché sont grapillés. Citons par exemple des commencements de disruption sur leurs clientèles BNC, sur les SCI, auprès des auto-entrepreneurs, envers les créateurs… mais aussi sur des petites prestations juridiques, sur la paye ou la compta en ligne.

Heureusement, pour beaucoup de cabinets, les clientèles disruptées sont marginales et les honoraires concernés ne sont donc pas significatifs. Mais attention, cela touche souvent des clientèles marginales mais en devenir.

Mis bout à bout, cela peut commencer à fragiliser les experts-comptables. On parle ici de défragmentation lancinante du chiffre d’affaires et de la marge.

 

Un phénomène d’accélération ?

 

Ce phénomène s’accélère nettement sous l’effet conjugué de 3 facteurs clés :

1. Une déréglementation inéluctable et des changements de seuils,

2. La digitalisation de la Donnée accessible par d’autres acteurs,

3. Le manque d’attractivité de la profession qui ne l’aide pas à réagir.

 

Pour autant, la forte complexité fiscale, juridique et administrative reste omniprésente et freine encore largement les concurrents dans leurs efforts de disruption.

 

Passer d’une stratégie générique à une politique de l’offre

Progressivement les cabinets sont en train de basculer d’un marketing de la demande en réponse au tout venant vers une stratégie de ciblage. Logiquement, cela procure autant de menaces que d’opportunités.

Une chose est certaine, la fonction marketing du cabinet devient prépondérante.

Le processus est normal et il ne pas faut s’en inquiéter. La majorité des cabinets admettent désormais fonctionner comme des entreprises.

 

A l’occasion de la 1re journée d’échanges de la CEG, animée par RCA et à laquelle 5 membres du CJEC participaient dont le président Yves PASCAULT, il a été question du passage d’une stratégie générique vers un MARKETING DE L’OFFRE appliqué à l’expertise comptable.

Voir la vidéo “D’une stratégie générique vers un marketing de l’offre”

 

Jérôme CLARYSSE
Président de RCA

 

 

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