28 novembre 2016

Données partagées : Pourquoi les SI sont-ils, à votre avis, un enjeu majeur dans la formation de l’EC/CAC aujourd’hui ?

Sophie Maladri et Richard Chaulet :

L’environnement des experts-comptables et des CAC est désormais dématérialisé ou tout du moins en passe de l’être totalement.

Nous travaillons à partir des données informatiques de nos clients, en un sens et sur nos métiers, nous devenons en quelques sortes des data-analysts.

La relation avec nos clients change ; nous sommes plus en temps réel à travers les SI. Nous pouvons apporter de nouveaux services en utilisant la puissance du Cloud Computing.

De plus, nos clients sont tous impactés par la transformation digitale. Nous devons ainsi, par une bonne connaissance des sujets SI et de leurs impacts, les accompagner dans leur transformation, que ce soit sur la partie administrative, notre coeur de métier, ou sur le business qui fournira les données à traiter.

Puissance des SI pour développer nos services, instantanéité et rapidité des échanges et co-production avec nos clients via des portails sont aujourd’hui au coeur de nos métiers.

Amaury Trompette :

Située au centre de l’information, une quantité presque illimitée de ressources est à disposition de l’expert-comptable, encore faut-il savoir comment la récupérer et la traiter. Une maîtrise des SI peut permettre à la profession comptable d’enrichir son produit fini et donc de fournir à ses clients davantage de conseils pour leurs décisions de gestion.

Concrètement, pouvez-vous nous donner un exemple pour lequel la formation actuelle fait défaut ?

Amaury Trompette :

Aujourd’hui, tout le monde utilise l’informatique dans la profession, mais qui sait comment cela fonctionne ? Expert-comptable, ce n’est bien évidemment pas un métier de développeur informatique, mais savoir que le logiciel comptable ne fonctionne pas sous forme de journaux, grands livres etc. peut aider la profession à choisir des solutions logicielles qui seront profitables aussi bien pour lui que pour ses clients.

Sophie Maladri et Richard Chaulet :

La formation fait défaut sur la connaissance des systèmes d’information de nos clients dans leurs dimensions fonctionnelles. Il ne s’agit pas du remplacement du papier par de l’informatique mais de nouvelles manières de travailler, d’interagir avec son écosystème, de développer des marchés, de changer des usages.

Ce sont également les business models de nos clients qui sont remis en question par ces nouvelles manières de fonctionner, d’exercer leur métier.

Nous devons être au coeur de tous ces bouleversements. Nous vivons une époque passionnante en ce sens, et il faut renforcer la formation si nous souhaitons nous positionner comme partenaire du développement de nos clients.

Sur une échelle de 1 à 10, à combien évaluez-vous la culture informatique dans la profession ?

Sophie Maladri et Richard Chaulet :

5 sur 10. J’ai envie de dire “malheureusement”. Il faut réagir : nous avons du chemin à faire car nous avons trop longtemps considéré l’informatique comme une affaire d’informaticien.

Sans aller vers une culture technique complexe, nous devons désormais appréhender l’univers digital dans toutes ses dimensions : commercial, marketing, stratégie, finances et business model.

La transformation actuelle n’est pas seulement une question d’outil mais plus une question de transformation économique. Je la qualifierais plus de “par le digital” que de “digitale”.

Amaury Trompette :

Je dirais 5 également. La conscience de l’importance de l’informatique pour l’avenir de la profession est bien présente.

Cependant, je préfère voir dans le numérique des opportunités plutôt que des menaces : nous parlons souvent d’ubérisation de la profession, des dangers des cabinets 100 % numériques et low cost…

Certes la profession évoluera, mais l’informatique peut également permettre aux experts-comptables d’apporter des outils d’aide à la gestion de ses clients, et donc de renforcer son rôle de conseiller et de confident envers les chefs d’entreprise.

Sans faire des stagiaires des ingénieurs en informatique, que proposez-vous ?

Amaury Trompette :

Lors de nos études, l’informatique est une matière “secondaire”. Apprendre à coder ou créer un site n’est effectivement pas la solution. Appréhender les écritures comptables comme étant des données permettra aux futurs experts-comptables de pouvoir choisir et conseiller des outils informatiques efficaces en vue de la transition numérique en cours.

 

Sophie Maladri et Richard Chaulet :

Un niveau de certification sur la culture digitale obligatoire, ainsi qu’une formation renforcée sur l’évolution des systèmes, des réseaux, des modes de développements.
Une maîtrise des différentes briques fonctionnelles que nous pouvons rencontrer chez nos clients : financier, CRM, gestion, portail…
Un renforcement sur la connaissance des nouveaux modèles économiques liés au digital, l’économie du partage, les nouveaux services, la valeur des data…
Nous n’avons encore rien vu. Et n’oublions pas une bonne maîtrise des outils bureautiques pour traiter efficacement les données.

 

Enfin, comment imaginez-vous votre métier dans 10 ans ?

Sophie Maladri et Richard Chaulet :

Les échanges de données informatiques apporteront les écritures comptables automatiquement, il faudra savoir les manipuler, les cadrer, les analyser et enfin les rendre parlantes pour que ces données financières aient de la valeur. L’utilisation des outils de Business Intelligent prendront leur place. Nous serons d’autant plus garants de la fiabilité des données que celles-ci seront importées et non plus saisies. Nous devrons nous assurer de la continuité des intégrations de données et de leur exhaustivité en même temps que de l’existence d’une piste d’audit fiable. S’en assurer ou la mettre en place car cette expertise est au coeur de notre métier.

La formation doit donc suivre le cap : compréhension des SI et du monde économique, base des organisations et contrôle interne des SI, analyse des données et relation client pour expliquer, éclairer, conseiller et délivrer notre valeur ajoutée.

Amaury Trompette :

Selon de nombreuses études, la saisie comptable a 99 % de chances d’être robotisée dans les 10 ans à venir.

Dans 10 ans, l’expert-comptable conservera son rôle de conseil, qui sera affiné par une augmentation de la richesse d’information produite par les logiciels comptables. Quant aux collaborateurs, ils auront un rôle proactif dans le suivi des chiffres de leurs clients : le temps qu’ils passaient autrefois dans la saisie sera alors utilisé pour faire des reportings réguliers sur l’évolution de l’activité des entreprises.

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