2 février 2021

Élu le 15 décembre 2020 a la présidence du Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables (CSOEC), Lionel CANESI, tête de la liste ECF et Union des Libéraux « Fier d’être expert-comptable », souhaite mener sa mandature selon trois axes majeurs : le poids de l’expert-comptable au cœur de l’économie, l’indépendance numérique de la profession, la formation. Lionel CANESI a été contrôleur national du stage et président du comité attractivité de 2013 à 2016 puis président du Conseil régional de l’ordre de Provence-Alpes-Côte d’Azur.

 

Vous souhaitez que la profession pèse sur les orientations et décisions économiques du gouvernement. Avez-vous, entre autres, l’objectif de prévenir une “loi PACTE expertise” que beaucoup prédisent pour les trois à cinq années à venir ?

Les experts-comptables vivent aux côtés des chefs d’entreprise, ils les conseillent, les orientent dans des choix stratégiques.

Et dans la période troublée que nous traversons, ils sont des guides essentiels dans le maquis des dispositifs gouvernementaux, des prêts, des activités partielles… J’ai du mal à imaginer que les autorités veuillent nous réserver le sort que les commissaires aux comptes ont accepté il y a quelques mois.

Pour autant, nous devons être vigilants : l’expertise comptable doit retrouver la place qu’elle n’aurait jamais dû perdre, au coeur de l’économie, au centre des débats qui l’animent. La voix des 20 000 experts-comptables doit être entendue, respectée et écoutée sur l’ensemble des sujets qui concernent l’économie de notre pays. Ce sera l’une de mes missions. C’est en tout cas l’un de mes engagements.

 

Vous ambitionnez une indépendance numérique de la profession. Qu’entendez-vous par là ? Quelles actions comptez-vous mener ? Quels impacts concrets auront-elles dans notre pratique quotidienne ?

 

L’indépendance numérique est un enjeu central des prochaines années et une des priorités du projet que je porte, avec mon équipe pour les prochaines années.

Elle passera par la mise en place d’outils numériques mutualisés pour les confrères.

Le CSOEC doit permettre d’apporter des solutions concrètes aux cabinets.

Avec Jean SAPHORES, vice-président chargé du projet numérique, nous allons créer une plateforme d’archivage des fichiers des écritures comptables (FEC), pour disposer, à terme, d’une base de données incomparable sur le marché.

Ce datalab, nom de code “jedata.com”, permettra d’être plus utiles à nos clients, avec par exemple des analyses comparatives, sectorielles, ou géographiques, mais aussi prédictives, dans les années qui viennent, en observant des tendances sur le long terme.

Le Conseil supérieur va recruter des data scientists pour créer les algorithmes qui serviront l’ensemble de la profession.

Surtout, ces projets, ces solutions, que les experts-comptables pourront utiliser dans leurs cabinets, seront gratuites.

L’institution doit servir les confrères et les consoeurs, et leur être utile. Ça sera le fil conducteur de notre mandature.

 

A propos de la formation, vous évoquez les métiers du futur et les profils des collaborateurs dans les 10 années à venir. La troisième étude des Moulins “Quels métiers demain ? montre que les activités de production, directement menacées par l’automatisation, assurent encore près de 70 % du chiffre d’affaires des cabinets et occupent l’essentiel du temps des 140 000 collaborateurs. Apres des années de production, la plupart d’entre eux vont devoir se transformer en conseiller. Or cela fait plusieurs décennies que toutes les instances et consultants tiennent ce discours.

Comment allez-vous réussir cette métamorphose qui n’a pas eu lieu jusqu’ici ?

Le constat est simple : aujourd’hui, tous les territoires de France connaissent une pénurie de collaborateurs. C’est le principal frein au développement des cabinets.

Il est temps d’apporter des solutions concrètes à une situation très pénalisante. La mise en place de CFA (centres de formation d’apprentis) régionaux en fait partie tout comme la création de parcours de formation labellisés au sein d’une “école de la profession”.

Concrètement, le Conseil supérieur doit définir les profils des collaborateurs dont auront besoin les professionnels au cours des prochaines années. Il faut préparer un cursus de formation adapté. Dans ce domaine, le CSOEC ne peut pas et ne doit pas agir seul. Les conseils régionaux doivent s’emparer de ce sujet. Et nous travaillons en symbiose.

Les conseils régionaux pourront proposer aux établissements d’enseignement de mettre en place ces formations, labellisées par l’Ordre des Experts-comptables. Enfin, concernant l’apprentissage, la création de CFA régionaux permettra de maîtriser les compétences des futurs alternants qui seront accueillis dans les cabinets.

Il faut avancer sur ces deux fronts en même temps. Et cela fonctionne, comme le prouvent au niveau local les actions des Ordres régionaux de Paris Ile-de-France et de Provence-Alpes-Côte d’Azur, avec la première formation de data scientist pour les experts-comptables et l’école ACE.

 

Vous avez évoqué avec le president de l’ANECS, Adrien DECOSTER, votre projet de « régionalisation » des épreuves du DEC. Comment envisagez-vous cette décentralisation ? Quelles actions comptez-vous mettre en oeuvre auprès du ministère pour que ce projet puisse aboutir ?

Il faut être pragmatique. Nous avons connu, l’année dernière et peut-être cette année encore, une situation exceptionnelle qui nous a obligés à repenser notre mode de fonctionnement.

Il faut donner plus d’importance aux régions qui sont au plus près des professionnels et des étudiants. Nous travaillons déjà avec le ministère sur la décentralisation des écrits du DEC pour la session de mai 2021.

Jacques MAUREAU, vice-président chargé de la formation, portera ce projet.

 

Concernant l’attractivité, nous pensons qu’il faut avant tout, savoir garder ceux qui ont fait le choix de la profession. En effet, c’est plus de la moitié des jeunes professionnels qui quittent le cabinet a cause d’un management qui n’est plus adapte à la génération actuelle et des salaires bien inférieurs aux salaires d’entreprise à diplôme et expérience égaux. Comment l’institution peut-elle faire évoluer ce point ?

Votre regard est forcément très intéressant. Vous pointez une difficulté que nous aurions à changer nos modes de management. Il y a rarement de fumée sans feu. Je pense aussi que nous devons collectivement évoluer sur ces questions de management.

Pour autant, les niveaux de salaires, s’ils sont évidemment importants, ne sont pas le seul critère d’intérêt des jeunes générations et c’est tout l’enjeu. Charles BASSET est en charge de l’attractivité au sein du Conseil supérieur. Il sait qu’il existe un décalage entre la vision de la profession par la société et son utilité au quotidien. Encore une fois, l’exemple de la crise sanitaire et économique a démontré notre rôle de “médecin” des TPE/PME.

Il faut maintenant le faire savoir et je m’y emploie depuis le début de mon mandat.

 

Qu’attendez-vous de l‘ANECS et du CJEC tout au long de votre mandature ?

Par principe, je considère que je n’ai rien à attendre, mais tout à mériter. En même temps, je sais qu’il y a chez les jeunes experts-comptables une réelle envie d’agir pour que la profession s’adapte et évolue. Vos propositions ne seront jamais ignorées.

Surprenez-nous, bousculez nous, obligez-nous à sortir de nos zones de confort. C’est vital, et c’est surtout indispensable à la profession.

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